C’est l’une des premières impressions quand on débarque de Tokyo, qu’on refoule un moment car elle n’est pas correcte, et puis qu’on finit par s’avouer car il faut bien s’avouer les choses : les Chinoises ne sont pas belles – pour la plupart d’entre elles – et comparées aux Japonaises. Alors on essaie d’expliquer, on imagine des causes, on empile la pauvreté, la pollution et la révolution culturelle, on pense au président Mao et au confucianisme mais rien n’y fait, aucun cliché n’y changera – et l’on ne comprend pas, on ne sait pas quoi en faire, on reste là avec son sale jugement au travers de la bouche. Je songeai à la phrase d’Henri Michaux : « Dans le visage de la jeune fille est inscrite la civilisation où elle naquit. Elle s’y juge, satisfaite ou non, avec ses caractères propres. »
Qu’est-ce que cela voulait dire ?
Alors que je marchais de maison en maison dans les rues de Shanghai avec la dame de l’agence immobilière, j’eus tout loisir d’observer celui des jeunes filles que nous croisâmes, et son visage. J’eus la révélation soudain, lorsque ma real estate woman ouvrant son sac à main fit apparaître un tube de rouge à lèvres, du fond de ce mystère : trois quarts des Japonaises se maquillent tant qu’à défaut de devenir toutes belles sous leur croûte cosmétique on n’en voit plus de laide. Leur peau s’est perdue dans la poudre, les traits sous le pinceau s’ordonnent en un portrait. Au contraire beaucoup de jeunes Chinoises ne se maquillent pas, ni ne s’épilent – elles ne passent pas leur heure par jour dans une salle de bain, à se cacher. Non donc qu’elles soient laides – je voyais leurs moustaches, leurs sourcils. Oui pour la première fois déambulant entre les corps il y avait des visages. Ainsi c’est comme cela, une femme ! réalisai-je.
幻想的中国 / Chine Imaginaire 